Sunday, April 17, 2005

Sensation Sri lankaise

« Se sentir chez soi dans la coquille des autres comme un Bernard l’hermite. »
Jacques Lacarriere


J’aime cette sueur qui coule sur mon corps dès les premières minutes de la journée cette poussière qui imprègne tout,…et cette liberté de parcourir les routes au milieu de cette population nonchalante.
J’aime aussi cette sensation forte de se sentir en vie et de savoir que celle-ci ne tient qu’à un fil. Ici on vit avec le danger et on prend des risques en permanence et c’est sans sécurité excessive, mais avec une grande vigilance, que l’on reste en vie sans avoir peur des dangers. Ils ne sont pas dans « le tout sécurité mais dans le tout risque » et j’ai la sensation que cela donne plus de conscience et les rend heureux de vivre, sans plainte et sans tristesse [extériorisée en tous les cas]. La maladie et la mort les frôlent et je ne peux pas lire de la peur mais le sourire d’être encore en vie. Le danger le plus signifiant est celui des transports….la conduite est indescriptible bien qu’elle ressemble à la conduite de beaucoup de pays du sud, conduite au centre [ni a gauche, ni a droite] avec la loi du plus fort. Comme chacun, je monte dans le bus en marche, m’agrippe à la barre, le pied en équilibre sur le marche pied, il suffit d’une minute d’inattention pour se retrouver sur le macadam. La sortie du bus au milieu de la chaussée est un jeu de slalom-risque afin d’éviter les tuc-tucs, les vélos et les camions ! Cela n’empêche aucunement les enfants, les vieillards et toute la population de marcher sur la route dans une passivité étonnante.
J’aime cette prise de risque, cette indiscipline, tellement différente du « tout sécurité » de nos pays avec nos ceintures, nos trains climatisés avec fenêtres fermées, nos sièges auto, nos alarmes etc…
Parmi tous ces dangers le plus grand et le plus dévastateur a été le Tsunami [avec un T majuscule comme ils l’écrivent]. On ne peut avoir la moindre idée de ce que cela peut être, vu de l’extérieur…une série d’attentats, un pays en guerre, un tremblement de terre, je ne sais à quoi comparer ce désastre, je n’ai jamais rien vu de semblable. De Colombo à Jafna, sur 1 kilomètre à l’intérieur des terres ce ne sont que ruines, maisons effondrées, montagnes de gravats, il ne reste que les chapes de ciment au sol pour repérer l’existence d’une habitation. Aujourd’hui des cabanes en bois remplacent progressivement les tentes qui sont encore là, par centaines de milliers au milieu des marécages, eaux stagnantes que la mer a laissées derrière elle et où pourrissent tout ce que pouvaient contenir les maisons. Au milieu de cela une population démunie de tout, leurs maisons, leurs meubles, leurs souvenirs, leur travail, leurs échoppes et meurtrie par les pertes de membres de leur famille qui se comptent le plus souvent sur les doigts des deux mains. Tous ont vécu un film d’horreur. Ils sont marqués dans leurs chairs et dans leurs cœurs. Les morts sont là et hantent les marécages, il n’y a pas de cimetière, pas de tombe mais des corps enterrés ça et là au milieu de leurs habitations de fortune.
Face à tout cela un Etat qui n’est pas en mesure de gérer un tel évènement. Je suis incapable de juger l’intégrité de la politique menée. Toutes les victimes se plaignent du gouvernement qui ne fait rien. Il est vrai que les seules choses qui évoluent sont prises en charge par les ONG.
Les premiers jours j’ai été surprise, étonnée et décontenancé de voir que la population qui ne faisait rien pour se mobiliser, pour reconstruire, il y a un laisser aller surprenant que je n’arrivais pas à comprendre. Voir les jeunes et les moins jeunes déambuler toute la journée sans autres activités que d’alpaguer les touristes [ la plupart part des ONG] alors que le pays est dévasté.

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