Friday, November 25, 2005

Pas facile, facile !

« …..Tout Indien tend à « se fixer », à se reconnaître dans l’aspect mécanique d’une fonction, dans la répétition d’un acte. Sans ce mécanisme et cette répétition, son sentiment d’identité recevrait un sale coup : il tendrait à se défaire et à s’évaporer. C’est pourquoi, à tous niveaux, les Indiens apparaissent comme codifiés ; C’est ce qu’on appelle conformisme en Europe, mais qui ici, n’étant ni bourgeois ni petit bourgeois, mais traditionnel, d’une tradition désespérée, n’a rien de mesquin ni de restreint : la petitesse à laquelle il réduit l’homme a quelque chose de grandiose. »

L’odeur de l’Inde de Pier Paolo Pasolini

C’est une bonne illustration de se qui se passe ici. Il y a un « conformisme » étonnant qui peut par moment devenir insupportable mais, allez savoir pourquoi, il y a aussi quelque chose de grandiose dans cette tradition et cette inertie qui transforment l’énervement en un doux sourire! J’ai vu cette semaine 16 femmes, 10 d’entre elles voulaient entreprendre une activité de poissons séchés ! Lorsque la première femme m’a présenté cette idée, je l’ai trouvé bonne, à la dixième, j’ai cru que j’allais craquer !
Autre découverte, j’ai revu certaines des femmes qui avaient repris une activité, beaucoup l’ont arrêté pour différentes raisons, souvent des problèmes de santé, les concernant ou concernant quelqu’un de leur famille, d’autre par fatalisme, et certaines parce qu’une fois les premiers bénéfices encaissés, elles n’ont pas réinvesti. J’ai donc passé la semaine à tenter de leur expliquer le minimum à savoir pour gérer sa propre activité : le calcul du prix d’achat d’un produit, le prix de vente, le calcul du bénéfice et l’importance du réinvestissement. Dorénavant, je les verrai tous les mois. Je leur ai fourni un cahier pour tenir leurs comptes.
Beaucoup de remises en questions cette semaine à l’issu de ces rendez vous. Difficile d’aider sans vouloir pour autant bousculer les habitudes et la culture.
La vision, ici, est, en général, à très court terme. Mais alors pourquoi essayer de les faire envisager du long terme ? Economiser, réinvestir, mettre de côté pour l’avenir, autant de notions totalement étrangères à leur mode de vie ! Un travail ici c’est au coup par coup, on travaille un jour, le lendemain, on verra ! Pas d’affolement….d’autant plus qu’actuellement toutes ces familles vivent avec les 5000 roupies distribuées par le gouvernement suite au Tsunami. Que va-t-il se passer lorsque cette aide sera coupée ? Quand sera-t-elle coupée? Personne ne le sait et personne ne s’en inquiète !
En occidentale de base, je m’inquiète et je prévois pour l’avenir. Ici, aucun stress, on a de l’argent aujourd’hui, pourquoi penser à demain ?

« Si l’Indien perd son insécurité, sa douceur, sa crainte, sa passivité, que devient-il ? »

L’odeur de l’Inde de Pier Paolo Pasolini