Sunday, June 26, 2005

Communication


La communication

C'est la clef de voûte de l'édifice puisque, sans les ventes le projet s'écroule, j'ai donc décidé de mettre le "paquet sur l'emballage" (certain comprendront l'expression ) .J'ai décidé de ne rien précipiter et "d'attaquer le marché" quand tout sera réellement au point, communication et promotion assureront l'avenir de la vente des sacs.
Les cartes postales sont imprimées, en anglais et en français, Christel a fait un diaporama musical qui permet de présenter le projet. Véronique, une amie qui travaille à Los Angeles est d'accord pour faire le site web!! et le logo qu'elle a dessiné est maintenant brodé et sera cousu sur chaque sac.

Saturday, June 25, 2005

les début de l'atelier



Pour commencer : le décor

Je suis dans ma nouvelle maison qui sert aujourd’hui d’atelier.
Assise sur ma terrasse, face à une plantation de cocotiers je peux admirer le ballet des troncs longitudinaux qui se balancent au grè du vent avec souplesse, les feuilles telles des cheveux frangés dressés comme des épouvantails . A leurs pieds une foule de femmes (essentiellement) attendent la sortie de leurs chérubins dans l’école située de l’autre côté de la route. Par la porte ouverte qui donne sur le salon-atelier, deux femmes se concentrent sur leurs machines à coudre.
Beaucoup de nouveautés encore cette semaine. Grande réunion chez moi dimanche dernier avec les 20 femmes qui ont finalement voulu participer à l’atelier. Au départ une seule femme s’était présentée comme sachant coudre, après la présentation du projet plus de vingt femmes savaient soudain coudre et avaient des machines …… !!!!!
Le Sri Lanka dans toute sa splendeur, vous pouvez interroger 10 fois la même personne sur un même sujet et vous aurez 10 réponses différentes ! Quant aux machines à coudre j’ai toujours pas élucidé l’énigme….je présume que lors de mes premiers passages elles ont déclaré ne pas avoir de machine dans l’espoir que je leur en donne -ceci dit j’ai visité toutes les maisons sans voir l’ombre d’une machine-, et maintenant qu’elles ont compris que je payais pour la réalisation de sacs, les discours changent et elles s’arrangeront pour aller coudre dans de la famille.
Donc pour m’assurer de leurs connaissances en couture je les fais venir deux par deux chez moi pour réaliser un sac (et oui j’ai donc acheté grâce a vous deux superbes machines à coudre Singer à pédale digne de celles de nos grands mères !). Pas triste …..aucune pour l’instant n’est capable de faire de la couture ! Mais bon je ne désespère pas, je dois encore voir 6 femmes puis je démarre des cours, il me reste a trouver un professeur. Je passe au camp tous les jours et chacune maintenant veut faire partie du groupe couture. Les jalousies commencent, j’ai donc en toute hâte refait deux réunions pour toutes les femmes en expliquant le projet a nouveau. Evidemment un projet tel que le mien est à mille lieues de leur esprit, l’égoïsme inné ici les empêchent de penser groupe et intérêt commun. J’ai donc proposé de les voir chacune individuellement pour un entretien afin de définir le projet « de reprise à l’emploi » que l’on pourrait faire avec chacune d’elle.
En même temps quelque chose se passe et je gagne tous les jours un peu plus de leur confiance. J’ai eu la grande satisfaction aujourd’hui de voir venir une femme avec sa fille d’une dizaine d’années. Je leur avais proposé de venir avec leurs enfants si elles voulaient et j’ai installé pour eux une salle de jeux ( livres, crayons de couleurs, jeux, nounours). Je pense que le premier pas est fait et que les autres enfants vont suivre.


Derniere nouvelle et pas des moindres j’ai rencontré au détour du »cafe internet » Christel, photographe et journaliste qui a rejoint le projet et qui couvre les differents événements en vu d’une plaquette, de cartes postales et d’un site internet.
Sa présence à mes côtés est précieuse, on n'est pas trop d’être deux pour tout ce qu’il y a à faire.

Dans l’avenir…..à court terme :

Atelier enfant une fois par semaine avec Céline une jeune Francaise riche de son savoir faire manuel auprès des jeunes.

Conclusion, cela avance mais les sacs finalisés c’est pas encore pour demain….je sais que vous piaffez de vous promener avec les fameux sacs Ayubowan au bras mais gardez patience !!

Je vous embrasse chacun et chacune,

Solene

Christel Banderier, photographe qui suit le projet

Monday, June 20, 2005

Petit aparté….I

« Quoi qu’on fasse en voyage, ne jamais oublier ceci : qu’on est toujours au centre. De sorte qu’il importe peu, dans le fond que l’on voit ceci ou cela ; qu’on arrive ou non en retard ; qu’on manque un coucher de soleil : cet encombrement qui, dans la rue, m’oblige à modifier mon programme, je ne m’en soucie pas. »

Daniéle Sallenave

Ceci est certes une des grandes qualités des Sri Lankais.
Pour illustration l’anecdote avec le périple du week end dernier.
J’avais prévu avec la famille de Nirangela de partir pour deux jours rejoindre la merveilleuse famille chez laquelle nous avions passé les fêtes de Vesak.
Cette fois je ne suis pas allée les chercher avec mon touc touc , nous nous sommes retrouvés dans la ville de Matara à trois heures de route de Humgama où nous nous rendions . Ils sont arrivés avec 1 heure de retard après s’être levés à 6 heures du matin pour prendre un bus puis le train, puis un bus encore avant de me retrouver. Cette fois ils étaient 5, le père, la mère les deux filles et le petit fils ….entassés à l’arrière de mon touc touc sur les genoux les uns des autres (situation véritablement inconfortable que la plupart d’entre nous ne supporterions pas plus de cinq minutes) .
Une demi heure plus tard nous voici bloqués dans un embouteillage…..les minutes puis les quart d’heures passent et personne ne mouffte…..chacun attend avec une patience d’archange là où en France nous serions déjà descendus 4 fois de la voiture pour s’inquiéter de la raison de cet embouteillage et sans doute aurions nous déjà fait demi tour pour emprunter un autre itinéraire.
Il s’agissait de la grande manifestation politique organisée par les UMP ( le parti de droite du nom d’elephant party). Ils ont su fédérer tous les mécontents autour du thème du tsunami (et ca manque pas !!) , voici un contre pouvoir près a marcher, pendant 10 jours de Matara à Colombo. Le défilé devant mon touc touc pris en otage dura pas loin d’une heure ……aucun membre de la famille n’est descendu s’informer ou se dégourdir les jambes !!! Ils sont restés entassés a attendre patiemment. Nous reprenons enfin la route lorsque épuisée je m’endors à moitié au volant….je m’arrête pour une petite sieste, au milieu d’une décharge – dans ma précipitation- étends un tissu par terre et m’endors….(quelques minutes). Une fois encore aucun énervement, aucun commentaire de leur part, une tranquillité et une serénité remarquable. Quelques kilomètres plus loin je leur fait le coup de la panne d’essence…pas de problème toute la famille pousse le touc touc jusqu'à la station. Au final, après 6 heures de route (pour faire environ 150 Km)dans des conditions on ne peut moins confortables et imprévisibles nous arrivons à destination sans qu’il n’y ait aucune tension au sein du petit groupe mais avec une joie sincère de retrouver leurs amis.

« Cet encombrement qui, dans la rue, m’oblige à modifier mon programme je ne m’en soucie pas »

Cette immense qualité que j’apprécie et que j’admire peut aussi devenir leur plus grand défaut, une non réaction devant la plupart des événements, ce sur lequel je me bats avec douceur au sein du projet AYUBOWAN mais comment leur en vouloir, n’ont-ils pas raison finalement de prendre la vie telle qu’elle vient avec souplesse et patience plutôt que de se braquer et de s’énerver puisque de toute façon nous avons tous la même destination.

Sunday, June 19, 2005

Vacances!


Je rentre en effet de mon périple qui restera inoubliable!!!

Tellement d'émotion et de partage....
Je suis donc allée chercher "mes nouveaux amis" avec mon touc touc, j'ai passé la nuit chez eux après leur avoir fait un repas "français", quiche, salade et crêpes au chocolat... je ne suis pas sûre que la variation du rice and curry les intéresse mais bon.
Le lendemain, grand départ à 5 dans mon trois roues...pas triste et ce pour 6 heures de routes...avec bagages et picnic. Arrêt dans différents temples bouddhistes, je sais tout maintenant sur les prières, les 3 tours du stupa, l'arrosage de l'arbre sacré, l'offrande des fleurs de l'encens et les petites lampes à huile à allumer. Arrivée en fin de journée vers Humgama chez des amis de la famille, le mère genre mama de 36 ans! avec 5 enfants dont l'aîné a 20 ans! Super entente avec tous, la fille de 15 ans m'a pris par la main sans me lâcher pendant 3 jours, la petite de 6 ans est devenue ma grande copine toujours dans mes bras...enfin un grand bonheur d'amitié...baignade, douche familiale au puits, fabrication de cerf volant, danses, fou rire, chant...tout cela sans un mot d'anglais de leur part ....mon cinghalais progresse , j'aimerais vraiment pouvoir parler, j'attends avec impatience la méthode de langue que Jacques m'a envoyée.. Lundi c'était Vesak, la fête de la naissance et de la mort de Bouddha, tout le monde fabrique des lampes avec des bâtons de bambou et du papier crépon et il est de coutume de se faire offrir à boire et à manger gratuitement le long des routes, donc tout ce qui roule, char à boeufs, motoculteur, tracteurs, camions, bus circulent ce jour là surchargés de monde. On a participé à la tradition en enfournant les 14 personnes que l'on était dans une fourgonnette dont même la casse ne voudrait pas...! Et c'est parti pour une journée de ballade avec des arrêts multiples, soit pour boire et manger soit pour réparer l'engin à peine roulant....deux fois les roues crevées (réparation de fortune) et une fois le levier de vitesse rafistolé avec un bout de fil de fer....Vous voyez la scène, tout le monde descend, on se couche sous la voiture, on pousse, on tire,....et hop c'est reparti jusqu'a la prochaine crevaison. Tout cela par 35 degrés, empilés les uns sur les autres et cela n'empêche personne de garder sa bonne humeur et de chanter en tapant dans les mains....Comme j'aime tout cela!
Evidement je suis la mascotte de tous, et mon ego gonfle ce qui ne m'empêche pas d'être sincèrement heureuse au milieu de tous ces gens et de transmettre ma joie. Les adieux furent difficiles avec la promesse que je reviendrai pour l'anniversaire de la mère le 2 juillet...
Retour en partie de nuit avec la première famille (ma famille adoptive comme ils disent, j'ai maintenant deux soeurs en plus, Nirangela et Niroshee). Je suis traitée comme un coq en pâte, j'espère ne pas devenir trop macho! Mes souhaits sont toujours exhaussés avant même que je m'exprime...pour le dîner par exemple, éternel rice and curry, tout est sur la table, impossible de me servir seule, "une de mes soeurs ou ma mère" me remplissent l'assiette, elles, elles ne mangent pas tant que je n'ai pas fini!! A peine je finis de manger, on me tend un verre d'eau et une petite bassine pour que je me lave la main (et oui on mange toujours avec la main ici! les couverts cela n'existe pas) puis on me tend la serviette. L'une d'elle se précipite pour m'enlever mon assiette et une autre me tend un fruit.... Lorsque j'ai fini je suis priée de m'assoir au salon ou dehors pour boire le thé au lait qu'elles m'apportent sur un plateau!
Je fais tout pour résister à ce débordement d'attention, mais je n'arrive qu'à les faire rire quand je tente de refuser leurs services...me voir faire la vaisselle les fait tordre de rire et elles m'enlèvent l'éponge des mains en trois minutes...impossible de laver mon linge sans qu'elles me le prennent des mains....

realisation des lampes pour Vesak

Nirangela le jour de Vesak

Lakmini et son frére

Voyage avec la famille de Nirangela

tous dans mon touc touc le jour de Vesak

Wednesday, June 15, 2005

Ayubowan Women's Project





Ayubowan women’s project

step by step rebuilding incomes

Ce projet Ayubowan appartient à votre communauté, il a pour but de permettre à chaque famille d’avoir un nouveau revenu. Vous déciderez qu’elle femme dans la famille fera parti du projet.
Si vous acceptez de travailler ensemble sur ce projet il vous faudra créer un CBO et élire trois représentantes.
L’association Ayubowan est là pour vous aider a démarrer une nouvelle activité mais le succès dépend entièrement de vous.
Voici l’idée du projet : certaines d’entre vous réalisent des sacs en tissu que l’association achètera et revendra en France. Les bénéfices reviendront à la CBO pour démarrer une nouvelles activités lucratives pour les autres femmes de Welikade.
Ayubowan achètera des machines à coudre, fournira les tissus et trouvera le marché.
Shoba gallery nous apportera son soutien tant logistique que technique.
Les premières femmes investies dans le projet sont celles qui réaliseront les sacs. Elles sont au cœur du projet. Toutes les deux semaines nous auront un rendez vous avec les membres du CBO, Shoba Gallery et Ayubowan pour déterminer l’affectation des bénéfices.

Premier étape :

Acceptation du projet et création d’une Communuty Base Organisation, (CBO)

Deuxième étape :

Ayubowan monte l’atelier dans ses locaux. Achat de deux machines à coudre, un fer et tout ce qui est nécessaire pour la réalisation des sacs.
Une femme nommée Gayani, commence à réaliser les sacs. Elle est payée 70 roupies par sac :0,80 euros.
Deux autres femmes, en accord avec les trois parties : Shoba, CBO et Ayubowan. commenceront une période d’apprentissage sans rémunération.
Une autre femme, qui a comme tache de laver et repasser les tissus, reçevra un salaire.

Troisième étape :

Les deux femmes en apprentissage sont formées et réalisent leurs premiers sacs rémunérés.

Quatrième étape :

Avec les premiers bénéfices nous investissons dans des machines à tisser les cordes en fibres de noix de coco. Les femmes travaillant sur les machines doivent trouver leur propre marché.

Cinquième étape :

Les nouveaux bénéfices sont réinjectés dans de nouvelles activités pour les femmes n’ayant pas encore de travail.

Sixième étape :

Si il reste des familles sans revenu, le profit servira à aider les hommes de ces familles à créer leur emploi.

Septième étapes :

Quand toutes les familles de Welikade auront un salaire, le projet prendra fin et Ayubowan démarrera une aide pour un autre camp.

Tuesday, June 14, 2005

Des nouvelles du projet.

La semaine a été chargée, en voici les grandes lignes :

J’ai commencé par embaucher une jeune femme Sri Lankaise qui travaille auprès de moi comme interprète. Elle s’appelle Bouddhiqua, elle est bilingue en anglais et maîtrise l’ordinateur. Elle travaille avec moi à mi temps moyennent 600 roupies par semaine soit 5 euros ,non ce n’est pas de l’exploitation c’est le tarif en vigueur ici. Cela lui permet en plus de gagner un peu d’argent, de sortir de chez elle où elle est cloîtrée comme dans une prison.
J’ai choisi donc de proposer le projet auprès d’un camp du joli nom de Walikade J’ai choisi donc de proposer le projet auprès d’un camp du joli nom de Walikade : le magasin de sable situé à 3 km de Mirissa en direction de Matara. Vivent dans ce camp 65 familles soit 256 personnes, 17 femmes vivent seules avec des enfants. Le camps est retiré de la route, il est composé de maisons en bois, très serrées les unes aux autres, manque de terrain, une seule pièce séparée par un rideau où vivent jusqu'à 7 personnes. J’ai découvert qu’ils n’avaient ni eau, donc pas de toilette, ni d’électricité, et aucun ustensile de cuisine. Je suis donc allée sonner aux portes des ONG à Matara. Community Habitat Finance (CHF) m’a bien accueilli et m’a proposé d’estimer le coup et de financer les achats à condition que je gère les besoins…..bien ! mais pas si simple, rien n’est vraiment simple ic, il me fallait avant tout l’autorisation de l’ONG ayant construit les maisons en bois, il s’avère que c’est une assos Sri Lankaise qui aime pas du tout que les étrangers fourrent leur nez dans leurs affaires. Je suis donc allée les rencontrer ils m’ont répondu qu’ils s’occupaient de tout et qu’il fallait être patient. Je ne peux donc que les tanner régulièrement, je ne suis pas mécontente du résultat car ils ont fini par construire cette semaine une maison collective qui m’avait été demandée par les habitants et m’ont promis de livrer le nécessaire de cuisine demain. Dans le camp personne n’y croit mais j’ai bon espoir. J’ai fait rire toutes les femmes en leur mimant que je ramènerai le responsable de Sawalanka par les oreilles si il n’était pas là demain !

Les ateliers enfants



Tous les jeudis dorénavant il y a un atelier organisé à l'intérieur du camp dans la maison collective ( j'ai fait faire des bancs et des tables par un menuisier ). Trois se sont déjà déroulés, le premier avec Martine qui a fait faire des marionnettes avec des matériaux de récupérations, bouteille et plastique, journaux et farine pour la colle...puis le deuxième jeudi les enfants ont peints les marionnettes, grand succès avec plus de 30 enfants, et les mères très attentives autour. Jeudi dernier, c'est Céline qui a animé un atelier dessin sur le sable avec empreintes au plâtre...génial!

Saturday, June 04, 2005

La famille de Dilhani

Vie au camp

Friday, June 03, 2005

Aparté I - Trois portraits

I) Haute comme trois pommes et mince comme un haricot, la peau tannée et fripée par le temps, la petite Prema court du jardin à la cuisine. Deux épingles de nourrice tiennent son haut - en coton d'un jaune mal défini et agrémenté par une multitude de taches sans doute aujourd'hui indélébiles ajusté, en guise de jupe un morceau de tissu noué autour de sa taille, entre les deux une ligne sombre : son ventre. Jamais une paire de semelles ne la sépare de la terre, c'est toujours nus pieds qu'elle parcourt la maison ou le gazon. Posé sur ses épaules, un tendre visage émacié dont la chevelure grise est tirée en arrière, nouée en chignon. Si le visage s'immobilise on remarque des joues creusées avec des pommettes saillantes, un petit nez bien rond et des oreilles légèrement au vent, ornées de deux petites boucles dorées. Lorsque son visage s'éclaire c'est un feu d'artifice d'où surgit au coeur de ses yeux noirs légèrement cernés de bleu une lumière joyeuse qui entraîne un large sourire ouvrant sur trois perles blanches au centre d'une bouche partiellement édentée ...les pommettes à cet instant se remplissent et gonflent comme deux ballons prêt à s'envoler. Un rire en deux tons, sans doute autrefois cristallin accompagne cette transformation et ses deux bras fins et longs s'agitent pour signifier son contentement.


II) Recroquevillé sur son lit, le visage couvert d'une serviette à carreaux orange et vert, il est tourné vers le mur. Un sarong sale et une chemise à col dont la couleur initiale a du être blanche. Un demi tour, une lâche prise de la serviette et le visage perdu dans un lointain inaccessible fait face... il est ailleurs totalement hors du monde qui l'entoure. L'oeil gauche, vitreux, compense à peine l'oeil droit quasi inexistant mais parfaitement suppurant. La bouche refuse de s'ouvrir et les lèvres épaisses remuent en d'innombrables grimaces. Soudain les bras se mettent en mouvement pour tenter de communiquer avec le monde d'ici bas, le pouce décrit un balancement de droite à gauche au niveau de la gorge, puis la même main se dirige vers cet iris globuleux tentant de le garder ouvert entre le pouce et l'index. Le geste suivant lent et précis conduit sa main vers ses oreilles infirmes. L'unique oeil continue à fixer terriblement l'interlocuteur captif mais impuissant. La lèvre inférieure retroussée, toujours en mouvement, avide de trouver les mots qui ne viendront pas. Epuisé il repose sa tête sur cet oreiller d'un bleu crasseux avant de replonger dans sa solitude propre.

III) Son sari bleu trois fois noué autour de la taille, le mètre de tissu restant précieusement repassé en un pliage savant retombe sur ses épaules découvertes. Le petit haut ajusté souligne ses seins et laisse entrevoir son ventre. Sa longue chevelure noire est maintenue par deux broches et son visage figé par la cérémonie. Est-ce la même femme qui se retrouve quelques temps plus tard en tenue occidentale : pantalon noir et haut décolleté, laissant paraître un large médaillon en forme de coeur. Cette même femme au regard froid et statique illumine maintenant la piste de son sourire éclatant qui accompagne la luminosité saisissante de deux pupilles d'un noir profond. Sa présence se dessine dans ce corps en mouvement qui ondule en douceur sans se soucier de la cacophonie musicale en arrière fond. Je suis cette partenaire totalement subjuguée et hypnotisée par ce regard intense qui ne se détache pas du mien des heures durant, vaincue je baisse les yeux à plusieurs reprises mais toujours je les relève comme aimantée.